jeudi, décembre 06, 2007

La Chine inquiète

Une majorité d'Américains et d'Européens continue à voir dans la montée en puissance économique de la Chine une "menace", les Britanniques étant les seuls au sein de l'UE à y voir une opportunité, selon une enquête de la fondation américaine German Marshall Fund .
Les Européens sont plus inquiets (55%) que les Américains (51%), d'après les résultats de cette enquête d'opinion annuelle. Ces proportions sont toutefois en léger recul par rapport au sondage de 2006, qui montrait qu'Européens comme Américains étaient 59% à partager ce sentiment.
Dans le détail, les Français sont 64% à parler de menace, les Italiens 60%, les Allemands 57% et les Polonais 59%. Seuls les Britanniques sont majoritairement optimistes. Quelque 60% pensent que l'émergence économique de la Chine est une "opportunité".
Globalement, la persistance d'une forte défiance de part et d'autre de l'Atlantique se reflète dans le durcissement récent de l'attitude des autorités américaines et européennes à l'égard de Pékin sur les questions commerciales.
Ces gouvernements se plaignent de la faiblesse du yuan, entretenue artificiellement selon eux par les autorités chinoises qui sont ainsi soupçonnées de vouloir doper les exportations nationales. Ils demandent également une plus grande ouverture du marché chinois et dénoncent les violations des droits de propriété intellectuelle.
Fait nouveau, l'UE et les Etats-Unis ont depuis peu décidé de coordonner leurs efforts.
Plusieurs dirigeants de l'UE viennent d'effectuer un déplacement inédit en délégation en Chine pour demander une "accélération" de l'appréciation du yuan.
"Nous avons attiré l'attention" des Chinois sur les risques que se développent des "tendances protectionnistes en Europe" si la situation n'évolue pas, a prévenu cette semaine le président de l'Eurogroupe Jean-Claude Juncker.
Dans l'opinion occidentale, la Chine a mauvaise presse notamment parce qu'en raison de ses faibles coûts du travail elle est perçue comme le principal facteur à l'origine des délocalisations.
Or, selon l'enquête German Marshall Fund, 61% des Américains et 59% des Européens considèrent que les délocalisations sont la cause première des suppressions d'emplois dans leurs pays.
De manière générale, le sondage montre qu'une courte majorité d'Américains (52%) et d'Européens (53%) continue à percevoir la mondialisation de manière favorable.

Le miracle économique chinois est-il un leurre ? En tous cas, pour Evariste Bationo dont un extrait de l’analyse suit, le prodigieux bond économique chinois ne va pas sans conséquences, surtout sur la nature du régime politique en vigueur.
Source :
http://www.lefaso.net/spip.php?article24337&rubrique21
Le miracle et ses corollaires
A l’instar de tous les miracles, le miracle économique chinois ne va pas sans conséquences. En fait, les réformes économiques dites des quatre modernisations entreprises par Deng Xiao Ping se sont déroulées au mépris des règles de gestion communiste. Si fait que de nos jours, les esprits avertis ont du mal à définir véritablement le statut économique de la Chine. Certains osent cependant l’aventure en parlant d’économie sociale de marché mais, sans une réelle conviction. Aujourd’hui encore, l’on est à se poser la question de l’avenir politique de la Chine. Le dirigisme politique du Parti communiste survivra-t-il au libéralisme économique ?
En réalité, il lui serait difficile de rester pour longtemps sans subir les desiderata de cette nouvelle situation. L’histoire de toutes les révolutions du monde nous enseigne qu’elles ont été pour la plupart d’inspiration bourgeoise. Le PC pourra-t-il continuer sa politique de pensée unique et de gouvernance autocratique, face à une bourgeoisie naissante qui voudra placer son mot, sinon prendre les reines du pouvoir ?
Comme on le constate, cette nouvelle transition ne sera pas facile. Jusque-là, avec le PC, les contradictions idéologiques se sont réglées par des purges successives et des emprisonnements. Nous en voulons pour preuve l’élimination de la « Bande des Quatre » en octobre 1976, après le décès de Mao, en 1978 de tous les responsables de la politique agraire, en 1980 celle du groupe qui entourait Hua Guo Feng (Premier ministre de Mao) à la mort de Mao. Au préalable, selon l’historien Yves Trotignon, sous Mao lui-même, l’on a relevé entre 1950-1951 à Canton, 28 000 exécutions de cadres anciens et de grands bourgeois, qualifiés de «chiens courants du capitalisme étranger». Une fois de plus, le PC pourra-t-il opérer le miracle par rapport à ses anciennes amours ? Lui laissera-t-on le champ libre comme auparavant ?
C’est dire que le miracle économique chinois tant applaudi par l’Occident cache mal la satisfaction d’un objectif longtemps recherché : vaincre le dernier bastion du communisme. Cette victoire est d’autant plus imminente que de jour en jour, le front social ne cesse de s’élargir en Chine, eu égard aux contradictions du système capitaliste qui vise à cumuler recherche du profit maximum et épanouissement social. Selon un rapport produit par la centrale syndicale de Hong Kong (HKCTU) en juin 2004 : « …le taux de chômage réel dépasse 10% au niveau national et peut grimper jusqu’à 12% dans les zones urbaines.(…) Bref, en même temps que le terme de miracle économique était associé de manière de plus en pus fréquente à l’économie chinoise, la qualité moyenne de son emploi déclinait, l’émergence du chômage se profilait comme un défi très sérieux, et la participation de la main-d’œuvre allait chuter du fait du découragement croissant des demandeurs d’emplois qui avaient échoué à retrouver du travail. »
Comment donc arriver à contenir la révolte future qui se profile dans un pays où l’égalité entre tous était le maître mot et où l’Etat est resté garant de la couverture sociale de la population ? Certains analystes n’hésitent pas à parler de sombres perspectives pour le futur. Ce, d’autant plus que l’économie chinoise basée sur le progrès industriel aura davantage de mal à être concurrentiel. En effet, le coût des biens de production comme le pétrole ne cesse d’augmenter. Aussi, pour rester toujours compétitif dans une telle circonstance, l’on sera obligé d’empiéter sur les maigres revenus des employés tout en les faisant travailler plus. Selon toujours le HKCTU dans son rapport de 2004 : «La transformation du pays n’a pas seulement apporté une croissance économique rapide et le développement du commerce international, mais aussi une forte détérioration du système de distribution des revenus. Certains groupes sont devenus riches, beaucoup ont connu le statu quo et d’autres sont devenus plus pauvres.(…) Alors que son économie a fait un bond en avant, le système social chinois a opéré un net recul. Le concept d’Etat providence garant d’un système de sécurité sociale existait avant les réformes, mais il a aujourd’hui été remplacé par le système du « paie en fonction de ce que tu gagnes ».
Alors, le miracle économique tant encensé va-t-il une fois de plus donner raison à Mao Tsé Tong qui disait : «La pauvreté pousse au changement, à l’action, à la révolution.Une feuille blanche offre des possibilités infinies : on peut y écrire ou dessiner ce qu’il y a de plus nouveau, de plus beau.»


Démocratie en Chine, le mot sans la chose, par Bruno Philip
Journal Le Munde du 22 novembre 2007
Démocratie, processus démocratique, démocratisation : ces temps-ci, en Chine, hauts responsables, universitaires, intellectuels et journalistes resservent à toutes les sauces les déclinaisons du même concept. Ils révèlent parfois, en creux, la vivacité d'un débat qui agite les entrailles d'un appareil à la proverbiale opacité. Les uns, qui tiennent les commandes, veulent prudemment indiquer la marche à suivre vers la poursuite del' "ouverture" ; d'autres, tenants d'une orthodoxie postmaoïste en décrépitude, s'alarment de la "dérive capitaliste" de l'économie et s'offusquent du récent passage d'une loi sur la propriété privée ; d'autres encore, les "libéraux", regrettent le rythme trop lent des réformes politiques.
Mais que dire de ce parti-Etat dont les thuriféraires soutiennent qu'il est en train de changer, ne serait-ce que sous la pression des "circonstances" ? Que dire de cette Chine où le Parti communiste semble être plus puissant que jamais ? De ce régime où la mièvrerie des slogans, le paternalisme du pouvoir et la rigidité du système semblent plomber toute réelle évolution en ces temps où ce "pays du Milieu" joue un rôle central ?
A l'exception de vieux réformateurs au rancart et d'une poignée de dissidents non encore embastillés, tout le monde s'accorde plus ou moins, en Chine, pour estimer que le demos cratos n'est pas, ici, synonyme de ce que l'on l'entend en Occident. Démocratie peut-être, mais "aux caractéristiques chinoises", pour reprendre la vulgate en vigueur. De la même manière que le "socialisme aux caractéristiques chinoises" est l'expression officielle pour définir un système devenu une sorte de capitalisme sauvage depuis le lancement de la politique de réformes économiques par Deng Xiaoping, il y a presque trente ans, la démocratie, que le pouvoir entend repeindre, dans un avenir indéfini, aux couleurs chinoises, ressemble fort à un avatar d'autoritarisme adapté à la mondialisation. A l'heure où les flux d'information deviennent difficiles à maîtriser, où les campagnes grondent et les écarts de revenus se creusent, le pouvoir comprend qu'il lui faut lâcher du lest.
Démocratie, donc. Dans son discours d'ouverture du 17e congrès du PC, en octobre, le secrétaire général du parti, Hu Jintao, a mentionné soixante fois le mot. En janvier 2007, le premier ministre, Wen Jiabao, a déclaré sans ambages, au Forum économique de Davos, que, "sans réforme politique, la réforme économique n'aboutira pas".
Certaines déclarations, moins officielles, surprennent. Même si elles restent bien en deçà des joutes audacieuses agitant les milieux intellectuels chinois avant le mouvement de Tiananmen. "Mettre seulement l'accent sur les réformes économiques, tout en croyant que les réformes politiques peuvent être laissées de côté pour le moment est faux", a récemment déclaré le professeur Wang Guixiu, chargé de cours à l'Ecole centrale du parti. En septembre, un éditorial de l'hebdomadaire Xue xi shi bao ("Le Temps de l'étude"), publié par cette même école, estimait qu'une "économie démocratique a besoin d'un système politique démocratique".
En octobre 2006, un livre intitulé La démocratie, c'est une bonne chose, signé par Yu Keping, docteur en sciences politiques, proche des hautes sphères, vantait ainsi les mérites du "pouvoir au peuple", se réjouissant que les Chinois "commencent à adhérer à de nouvelles valeurs démocratiques, s'éloignent de la culture politique traditionnelle et se rapprochent de celle du temps de la modernité". M. Yu allait même jusqu'à espérer - débat crucial - que, bientôt, "le parti se séparera de l'Etat et que la loi prévaudra sur le parti". Mais attention, prévenait-il, toute réforme politique suppose "un certain niveau de développement économique" et, surtout, doit "s'appuyer sur le cadre politique actuel, au lieu d'en créer un autre". En clair, s'il s'agit d'améliorer le "règne par la loi" - ce qui n'est d'ailleurs pas la même chose que de garantir un Etat de droit - on met en garde tous ceux qui songeraient à mettre en cause le système. La stabilité, notion qui hante l'empire depuis des lustres, est à ce prix.
"Si la Chine se convertit à la démocratie parlementaire pratiquée en Occident, le seul résultat sera que 1,3 milliard de Chinois n'auront pas assez à manger. La conséquence sera un grand chaos...", assurait au New York Times l'ancien président Jiang Zemin, en 2000. Hu Jintao et son équipe ne semblent pas dire autre chose aujourd'hui.
"REPRÉSENTATIVITÉ CITOYENNE"
Le pouvoir a malgré tout besoin de renforcer sa légitimité. Il doit trancher entre les avantages d'une évolution vers une plus grande représentativité et les risques politiques représentés, pour le parti unique, par une démocratisation. Pour l'heure, le suffrage universel reste cantonné au village. Les promesses de vote populaire au niveau du canton et du district sont restées lettre morte.
La seule démocratie à l'ordre du jour est le projet de jeter les bases d'un processus électif permettant aux membres du Parti communiste de désigner leurs représentants. Si démocratie il y a, elle sera d'abord interne. En dehors du parti, quelques expériences pilotes visent à renforcer le rôle de la société civile et à démontrer que le pouvoir prend plus en compte les doléances des individus en élargissant la "représentativité citoyenne".
Les élections au suffrage universel dans les villages, les avancées du droit dans le domaine juridique ou commercial et l'explosion de l'Internet avaient pu donner à penser à certains que la démocratisation découlerait naturellement de ces évolutions. Ils sont restés sur leur faim. Les élections des maires de village sont parfois truquées ; les candidats sont cooptés par le pouvoir ; la marge de manoeuvre des élus est très limitée. En matière de droit, l'objectif est une plus grande efficacité de l'administration, pas la démocratisation. Les blogs prolifèrent sur la Toile, mais Pékin a mis en place la plus grande police de l'Internet du monde.
Le pouvoir pékinois emploie d'autant plus le mot de démocratie que celle-ci n'est qu'une perspective lointaine. Wen Jiabao a affirmé que la Chine n'en est qu'au "stade initial du socialisme". Cela signifie, en termes marxistes, que si la Chine est en train de changer, elle n'est pas mûre pour la démocratie.

Travailleur migrant
Sarko en chine
17ème congrès
中国别净给老外看好的

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