jeudi, mai 31, 2007

La Grande muraille

"Grande Muraille", la traduction occidentale usuelle du nom de cet édifice fait parfois sourire les chinois. Mais ils se gardent bien de le faire savoir, tant elle contribue à justifier l’énormité la plus souvent répétée du "seul monument visible depuis la lune". La Muraille de Chine n’est pas grande, elle est longue.

Son nom en chinois 长城 (Cháng Chéng) est composé de deux mots dont le premier est l’adjectif : long. Prononcé "cháng", il signifie : long, à la fois dans le sens de la taille et dans celui de longue durée. Le second caractère Cheng signifie : rempart. 城 chéng, combine le signe de la terre 土 (tǔ) avec le caractère 成 (chéng), qui signifie : accomplir
Construits en terre damée et recouverts d’un parement de brique ou de pierre, le rempart est ce qui "accomplit" administrativement et symboliquement une agglomération en la transformant en une " vraie" ville. Le rôle du rempart ne s’arrête pas aux portes des citées murées, il est aussi ce qui accomplit le " pays du milieu" en l’isolant des barbares nomades, c’est le but symbolique de la Grande Muraille.
Courant sur plus de cinq mille kilomètres c’est certainement l’édifice humain le plus étendu qui n’ait jamais été réalisé. Mais elle n’est pas "grande", c’est un simple mur (ou plus exactement un réseau de murs) tout juste destiné à stopper des cavaliers nomades venus piller les récoltes de paysans sédentaires. Il ne faut pas s’imaginer un rempart formidable destiné à contenir le choc d’armées puissantes. En revanche, son élongation avait un tout autre avantage, celui de fournir aux troupes chinoises une route de communication en terrain difficile qui leur permettait de réagir rapidement dans les cas où les razzias nomades avaient pénétré en territoire chinois.

La Grande muraille, " seul monument visible de la lune": histoire d'une rumeur
Le fantasme du "seul monument visible de la lune" est né à l’occasion de la visite historique du président Nixon à Pékin en 1972 qui marquait le renouveau des relations diplomatique entre les USA et la Chine, après une longue période de tension. Après son arrivée dans la capitale chinoise, Nixon avait été convié à une visite de la Grande Muraille et le soir, au cours des toasts précédant le banquet de bienvenue, il avait déclaré que les cosmonautes américains qui avaient posé trois ans auparavant le pied sur la lune avaient déclaré que la Muraille était le seul monument humain qui pourrait être distingué depuis la lune, sous-entendu en fonction de sa longueur. Nixon était un politicien rusé, en disant cela, il flattait ses hôtes tout en leur laissant entendre discrètement que seule l’Amérique était alors assez puissante pour envoyer un équipage faire ce genre de constatation depuis la surface de notre satellite. Les Chinois ont répliqué avec élégance, en diffusant largement la citation du président américain, omettant simplement le conditionnel qu’il avait employé et la phrase, répétée inlassablement d’abord par la propagande chinoise ensuite par le ministère du tourisme, a fait le tour du monde.
On en parle moins depuis qu’à l’automne 2002, après avoir fait quatorze fois le tour de la terre dans une capsule et une fusée spatiale 100% chinoise le colonel Yang Liwei ait été obligé de reconnaître qu’il avait été incapable de distinguer ce mur de 5 à 8 mètres de haut, déjà si difficile à apercevoir depuis les hublots des avions qui le survolent juste avant d’atterrir à Pékin.

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