dimanche, janvier 21, 2007

L' écriture chinoise.

« Je crois pouvoir réduire la différence qui existe entre la langue chinoise et les autres langues au seul point fondamental que, pour indiquer la liaison des mots dans ses phrases, elle ne fait point usage des catégories grammaticales, et ne fonde point sa grammaire sur la classification des mots, mais fixe d‘une autre manière les rapports des éléments du langage dans l’enchaînement de la pensée. Les grammaires des autres langues ont une partie étymologique et une partie syntaxique ; la grammaire chinoise ne connaît que cette dernière. »
Guillaume de Humboldt, " Lettre à M. Abel Rémusat sur la nature des formes grammaticales en général, et sur le génie de la langue chinoise en particulier " Paris, 1827. Editions Ducros.

La tradition rapporte qu' un personnage du 16ème siècle avant notre ère aurait inventé l’écriture chinoise en contemplant le mouvement des astres dans le ciel et en observant les empreintes de pas d' oiseaux sur le sol.
L' écriture chinoise est très particulière. Elle n' est pas, comme par exemple les écritures européennes, fondée sur un alphabet, qui est un ensemble de signes qui notent des sons. Chaque caractère du chinois est une sorte de figure exprimant un sens, une idée, à la manière d’un logo. Dans notre système occidental, le seul exemple de cette sorte de configuration est le chiffre (1,2,...), qui note un concept et non un son.
La multiplicité des homophones est un obstacle à l' évolution du chinois vers une lecture phonétique. Il existe une écriture phonétique alphabétique officielle du chinois – le pīnyīn – qui facilite grandement l' étude de la langue, mais un chinois lit beaucoup plus vite un texte formé de caractères qu' un texte écrit en pīnyīn.
Des statistiques indiquent que les 560 caractères les plus courants représentent plus de 80% de l' ensemble des caractères utilisés deans les livres, journaux et revues. Avec les 940 caractères suivants dans l' ordre de fréquence, soit 1500 caractères en tout, ce sont plus de 96% des caractères qui peuvent être reconnus. Enfin, avec 700 autres caracères, soit un total de 2200 caractères, on arrive à couvrir plus de 98% de la masse des caractères constituant les lectures courantes.
Le caractère 的 arrive en tête de tous les caractères dans l' ordre des fréquences ; il apparaît en moyenne quatre fois en 100 caractères. Suivent dans l’ordre : 一, 了, 是, 不, 我, 有, ... . Si l' on envisage les caractères en fonction de leur capacité combinatoire, c’est à dire de leur capacité à composer des mots, c' est le caractère 子 qui domine, présent dans 668 mots, suivi de 不, 大, 心, ... .
Le nombre total de caractères effectivement différent doit avoisiner les 20.000. Les imprineurs chinois ont généralement à leur disposition entre 7000 et 10.000 caractères.
Des dessins primitifs aux caractères actuels, l' histoire de l' écriture chinoise a connu différentes étapes. Ce fut d' abord les caractères sur os et écailles apparus durant le deuxième millénaire avant notre ère. Vinrent ensuite les caractères sur bronze, puis, il y a environ 2000 ans, l' écriture « petit sceau », l' écriture « des fonctionnaires », et enfin l' écriture régulière. L' évolution de la forme des caractères chinois à travers les âges s' explique principalement par le changement des supports et des instruments d' écritures.
Il y a 7 grands dialectes en chinois. Parmi eux, le cinois du nord, le mandarin, est devenu la langue commune, le standart. Les différences entre les dialectes sont d' ordre grammatical, lexical, mais elles se font surtout sentir au niveau de la prononciation : un chinois du nord ne comprend pas un habitant de Canton ou de Hong-Kong parlant cantonais. L' écriture, elle, reste la même.
Une langue réagit en écho à ce qui l' entoure. Elle est un miroir de son environnemet, de la culture, de la pensée.

Ainsi en chinois :
  • Le mot « pays », guojia, 国家, est composé des sinogrammes « pays » et « famille ». Ce seul mot, recouvre à la fois les 2 notions de pays et d’état.
  • Un seul sinogramme, beng, signifie « mourir » lorsqu’il s' agit d' un empereur.
  • Un seul sinogramme, shuan, signifie à lui tout seul « cuire de fines lamelles de viande en les plongeant peu de temps dans un bouillon en ébulition »... tout au moins devant le consommateur ( un autre verbe désigne la même action, mais effectuée dans les cuisines.).
  • Un seul sinogramme, xiao, désigne « le respect déférent et l’obéissance que l’on doit aux parents, aux aînés et aux supérieurs ».
  • Le mot « riz » se dira mifan s’il est cuit, dami à l’état brut, et shuidao s’il s’agit du riz dans la rizière.
  • A l' inverse, le chinois n' a pas de mot pour dire « logique » ou « humour » et a été obligé de les importer par transcription phonétique (luoji, youmo).
  • L' expression « peut-être »(keneng) annonce souvent une information qui est pourtant tout à fait établie. « Il est peut-être parti acheter de la viande pour faire des raviolis » : il s’agit ici d’indiquer que l' on ne veut pas s' ingérer dans les affaires d' autrui.
  • La façon habituelle de saluer quelqu' un est de dire : ni chifan le ma ? (As-tu mangé ?) ; on peut aussi recourir aussi à des phrases « en situation » telles que : shangban qu ! (Tu vas travailler !) ou jincheng qu ! (Tu vas en ville !). En guise d’au revoir, on utilise dans le même registre de langue l’expression : manman zou ! (Allez lentement !).
  • Pour demander l' âge de quelqu' un les convenances veulent que l’on réserve la question ni jisui le ? à des enfants et que l' on utilise ni duoda suishu ? pour une personne âgée. Jadis, pour indiquer son âge, trente et un ans par exemple, on avait recours à une expression de politesse, signifiant littéralement : « J’ai inutilement passé trente et un ans de ma vie. ». Les signes du zodiaque chinois étant liés à l’année de naissance, la connaissance du signe de l' interlocuteur permet de deviner son âge. La sagesse confucéenne enseigne qu’«à trente ans les opinions sont faites, à quarante, les incertitudes sont surmontées et à cinquante, on connaît les dispositions du Ciel ».
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